Singing in Paradise, 2004
Singing in paradise, 2004
Galerie Joyce Yahouda, Montréal
Notre joyeuse tribu de rats punk a déserté l'espace de la galerie, où seule une tête d'autruche discrète émerge du plafond percé. À quel monde parallèle appartient-elle ? Des petites grappes de sons invisibles ; bribes de conversations étouffées et mélodies diaphanes filtrent du plafond, se dissolvent dans l'espace vide et s'infiltrent dans nos imaginaires pour y secouer un peu la poussière de nos attentes formatées.
Invitation à l'exploration parallèle. Piqués de curiosité, les plus aventureux s'exilent hors des frontières de la galerie et découvrent, en arpentant la cage d'escalier, une petite plateforme de béton située entre deux étages de l'immeuble. Glissée sous l'escalier de service, une boîte de lait géante à l'intérieur de laquelle un homme-rat en costard blanc tout aussi géant, engoncé dans sa cuisine de fortune, prépare et distribue des omelettes d'autruche.
Basculement dans un monde de fantasme. Une porte lilliputienne. Les reflets scintillants, lueur magenta d'une enseigne lumineuse : « bar »... Des pétillements de rire qui perlent en cascade.
S'engouffrer dans le rêve souterrain. C'est à 4 pattes que s'entreprend l'aventure Carrollienne. Au détours d'un long couloir faiblement éclairé, on débouche sur l'atmosphère enfumée et alcoolisée d'un « speakeasy » (bar de contrebande durant l'époque de la Prohibition aux États-Unis et au Canada). Hommage à la liberté vécue en contrebande, par-delà la frontière de la réalité globale normative. Nos rats punk élégamment vêtus de blanc se sont transmués en « bootleger », maîtres de cérémonie de la fête clandestine. Pianiste claustrophobe, chanteuse afro américaine à la voix caverneuse, à la sensualité voluptueuse, nous envoient un blues à « faire pleurer un mécano allemand ». Un truc à y laisser son âme.
« Singing in Paradise », le chant des rêveurs.
Sophie Dejode, 2004