Théâtre de l'esprit
Par Valérie Sourdieux, 2012
Ce qui échappe au regard s'inscrit dans une autre forme de réalité, inconnue et parallèle. Delphine Balley observe depuis L'album de famille les différentes pièces de vie. Après les lieux habités et normés, elle ouvre la porte des espaces clos, inaccessibles et secrets, où l'intime est caché et protégé. Ce qui nous est donné à voir sont les traces d'une présence. Elle nous invite à visiter ces pièces désertées, représentatives de l'espace mental, qui composent le théâtre de l'imaginaire et de l'inconnu.
Comme les murs de la photographie Loirs à la tapisserie arrachée, la réalité est constituée de couches qui se mêlent à la fiction et proposent une lecture nouvelle de ce que l'œil peut percevoir. Ce qui intéresse précisément la photographe est cette part qui échappe, ce qui sort du champ de vision et des codes. Les lieux comme les êtres et les objets, se transforment et ce changement, signe de vie, prouve l'existence d'un univers tangible et autonome.
Malgré cette coupure avec le réel, l'écoulement du temps se poursuit hors champ, symbolique que l'on retrouve dans la photographie Sel, où une clepsydre aurait été vidée sur le sol. Notre perception perturbée par l'absence des repères habituels force l'esprit à composer une histoire et poursuivre la transformation. Et c'est bien ce que nous propose Delphine Balley, se réapproprier des images dont la trame effacée et mystérieuse se prête au théâtre de l'esprit.