Jajouka, 2012
Long métrage cinéma tourné en décors naturels avec Bachir Attar et les Maîtres Musiciens de Jajouka ainsi que les habitants de Jajouka, Maroc
Un film d'Éric et Marc Hurtado
Production ATOPIC
Durée 1h, Super 16 mm
Diffusions : Pré-projection et conférence, Musée du quai Branly, Paris, 2007 / Festival International du Cinéma de Belfort, 2008 / FIDMarseille, 2012 / Cinémathèque française, 2012 / Festival EntreVues, Belfort 2012 / MoMA, The Museum of Modern Art, New-York, 2012
● Présentation du film, 2012
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Un film d'Éric et Marc Hurtado
" ... Comme l'épine sur la soie..."
Chant des femmes de Jajouka
Jajouka, un petit village dans les collines du Rif Marocain. Depuis plus de 2000 ans s'y perpétuent des rites magiques de fertilité, les rites de Pan, proches des lupercales romaines, ainsi qu'une musique unique jouée par une confrérie de musiciens, Les Maîtres Musiciens de Jajouka. Brion Gysin, l'inventeur de la Dreamachine, qui découvrit le village dans les années 50, les disait descendants du grand poète persan du 12ème siècle, Farîd al-Dîn Attâr, auteur du poème initiatique Le langage des oiseaux, référence majeure de la tradition spirituelle soufie.
Toute une frange d'artistes, de musiciens et d'écrivains, dans le sillage de Paul Bowles et de Brion Gysin furent magnétisés par Jajouka ; Brian Jones des Rolling Stones qui enregistra leur premier disque, Ornette Coleman, l'inventeur du free jazz, W.S Burroughs, Thimothy Leary, le prophète du LSD, et plus récemment des musiciens comme Genesis P.Orridge, Lee Ranaldo et Thurston Moor de Sonic Youth.
Éric et Marc Hurtado, fondateurs du groupe ETANT DONNÉS, sont partis filmer ces adorateurs de Pan, ces musiciens qui mettent aussi leur musique au service des guérisons miraculeuses qui ont lieu au tombeau du saint du village, Sidi Ahmed Cheik.
Un film polarisé par l'attraction entre Bou-Jeloud, (Le Père des Peaux, Pan) et Aïsha, femme- démone, déesse de la nuit et des sources.
Il est d'or, elle est d'argent... un enfant court à perdre haleine poursuivi et fouetté par les branches d'olivier de Bou Jeloud... Aïsha écoute, veille... elle attend Bou-Jeloud près des rivières nocturnes... elle est dangereuse, il est le Père de la Peur.
Un film d'une poésie violente, en équilibre entre documentaire et fiction, (mais les légendes sont-elles des fictions ?), dont l'action s'enracine dans la transe de la fête et sa folie musicale, pour se refléter dans une larme d'enfant, une flamme, un chant éternel de femmes adressé aux hommes et au ciel.
JAJOUKA, Quelque chose de bon vient vers toi
Production ATOPIC
Tourné en Super 16mm, en décors naturels, avec les habitants de Jajouka.
● Texte de Jean-Pierre Rehm, catalogue du FIDMarseille, 2012
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En brefs tableaux stylisés, un conte archaïque ouvre le film pour revenir sur la création divine de la musique. Le mythe se prolonge dans un univers aux dimensions sacrées où il est difficile de départager le fantastique légendaire de sa perpétuation actuelle. Où est-on ? Dans le Rif marocain, à Jajouka, village où sont célébrés depuis plus de deux mille ans, en musique et en danse, des rites de fertilité présidés par Bou-Jeloud, "le Père des Peaux", version locale du dieu Pan.
On savait les frères Hurtado fameux musiciens : leur groupe Étant Donnés s'est signalé par sa collaboration avec Alan Vega, Genesis P-Orridge, parmi d'autres, ou avec Philippe Grandrieux pour qui ils ont réalisé la BO de plusieurs de ses films. On les savait aussi cinéastes expérimentaux. Les voilà conjuguer ici leur double passion, relevant le défi d'une remontée dans le temps pour saluer les Maîtres Musiciens de Jajouka, d'hier comme d'aujourd'hui. Le temps, d'ailleurs, aurait-il passé ? Il ne s'agit donc pas de fabriquer une partition destinée à accompagner des images autonomes, mais bien de faire de la musique (de sa stridente nudité, de son dépouillement incantatoire) et de son histoire, la substance même des images, du scénario à sa mise en scène. Leur choix, d'évidence pasolinien : ressusciter l'archaïsme en lui restant fidèle, dans le traitement des décors, des lumières, du jeu, des costumes. La beauté ici tient à ce frottement rugueux entre le mutisme des personnages et leurs élans effrénés en direction d'une autre voix possible.
● Lire un entretien avec Olivier Pierre, quotidien du FIDMarseille, 2012