Le soleil trompeur de l'occident ou les grands maux et les petites misères de l'utopie fantasmée
Le soleil trompeur de l'occident ou les grands maux et les petites misères de l'utopie fantasmée
Par Lise Guéhenneux
Catalogue de l'exposition Phantasia, Musée des Beaux-Arts d'Odessa, 1997
Niek van de Steeg refait le monde en construisant son monde où sa propre économie, son économie familiale par exemple, prend place. Il travaille sur la complexité de la réalité, celle d'une société qui a déjà une histoire et dont il construit la métaphore sous la forme d'un système à multiples entrées. Issue d'un projet architectural médiatisé auquel se rajoutent toutes les méthodes et les lectures médiatiques, la Très Grande Administration Démocratique devient une sorte de Tour de Babel fantasmatique où la fiction rejoint la réalité, et inversement.
Les objets utopiques que Niek van-de Steeg met en place dans ses propositions de dispositifs jouent sans cesse des changements d'échelles, allant de la maquette générale d'une construction au plus petit détail à gérer. L'espace de "correction" de cette gigantesque machine n'en finit plus d'apporter de nouvelles prises sur le réel mais, dans le même temps, risque de mettre en péril tout l'édifice, puisqu'un petit changement débouche sur de nouveaux paramètres à prendre en compte, de nouvelles relations à inventer. La machine peut devenir un décor - on pense alors aux décors des fêtes de la révolution de 1989 ou au monument à la IIIème Internationale de Tatline, pour ne citer que ces exemples. Cet instrument peut se montrer redoutable, devenir un piège, aussi est-ce par l'absurdité, la stimulation de mise en pratique ou l'utilisation et l'expérimentation réelle des fonctions de cette gigantesque structure que l'objet fantasmatique perd son caractère cauchemardesque pour devenir un instrument de jouïssance, de plaisir. La légèreté fait place à la menace grâce, notamment, à la nature des matériaux, à l'aspect bricolé, malléable et jamais parfait.