Texte de Clelia Coussonnet
Texte de Clelia Coussonnet, 2018
Pour l'exposition, Lokal-Int, Bienne (Suisse)
Boundary My skin is an illusion, a protection and a shelter when I am holding together, and then a disappearing membrane when my content is ripped open, my bursting energy unleashing.
Living organism I continuously morph, from one state to another, but I hold my own time and space –freezing time, escaping space, fomenting layers of stories, notably related to botany, trade and politics.
As a vessel, I am defined by movement and live embedded in a history of displacement, circulation and transplantation. I have always been navigating endlessly, my journey has no destination. I have been shaped by natural, raw, matter, strengthened and deteriorated by light, heat, wind, earth. Emerging from elements, I am a carrier of all sorts. I have been belonging to a history of humans encapsulating precious things to be preserved within my belly–precious things that I can hold tight or dangerously cage when I am a sealed recipient.
Hermetic My empty volume provides a micro in-vitro environment where new forms of life develop, uncontaminated, homogeneous, if we yield to the partial vision hinging on perceptible appearance. Permeable Both witness and agent, I am an envelope simultaneously in contact with an inner content and the outside world, embodying pervading encounters bound to manifest.
As a vessel, I engage with circular relations. I contain a territory; hold on landscapes, memories, stories, inheritance and knowledge from my original home; and inseminate new parcels of land when my content is released, my knowledge transferred and appropriated. By turns, I am a blood vessel, seed vessel, botanical receptacle spreading seeds and species, and even conceptacle reproducing and fertilizing. At my expense, I have been entangled in ideological structures, shifting natural diversity and balance, unaware of my effects. But, whatever controversial results, I produce hybridity.
Si les histoires à couches multiples sont spécifiques à certains contextes, elles n'en restent pas moins des récits globaux et partagés, car, à l'instar des rhizomes, elles se sont également produites ailleurs, sous des formes différentes.
Révélant l'impact de l'introduction de nouvelles espèces dans les paysages naturels, la composition tissée de A Hollow Full Thing (2019) puise dans cette histoire commune de circulation et de transplantation des plantes. Explorant le paysage artificiel de l'Australie, résultat de l'appropriation coloniale des terres et des connaissances, Sarah Sandler arrange des œuvres, d'une matérialité tactile évidente, dans une chorégraphie silencieuse. Vue depuis la fenêtre de Lokal-int, son installation permet un regard non pénétrant et présente des sculptures en verre soufflé à la main et en terre squelettique « creuses et pleines », reproduisant l’ancêtre du sac souple ou du conteneur hermétique.
Sandler déforme leur intégrité formelle en les exposant aux éléments naturels. Ce faisant, elle confronte les approches traditionnelles et modernes du transport et de l'échange des semences, faisant voler en éclats la détermination de la classification biologique systémique. L'espace est structuré par des panneaux suspendus transparents, issus de l'œuvre précédente I Speak Opuntia, You Speak Progress (2017). Réalisés à partir d'un processus manuel de collage utilisant de l'ocre, de la terre et des graines d'espèces végétales introduites en Australie, les panneaux confèrent une qualité particulière à la lumière et à l'air.
Encapsulés dans l'espace, tous les fragments de l'installation de Sandler développent une relation symbiotique, coexistant les uns avec les autres et trouvant leur propre rythme. Véritables réservoirs d'imagination, ils cartographient un territoire brisé et véhiculent un sentiment irrémédiable de perte, de permutation et de connaissance des terres qu'ils ont traversées ou auxquelles ils ont appartenu.
La pratique stratifiée de Sarah Sandler explore les interactions complexes entre les humains, la biologie et la politique. Elle examine différentes façons de voir à travers les structures du pouvoir, révélant la capacité des récits à être instrumentalisés dans la construction des idéologies politiques et de l'histoire. Son prochain film porte sur le partage du patrimoine agricole, les connaissances indigènes et la commercialisation des espèces autochtones dans le contexte australien des monocultures. Cet été, en collaboration avec Innen Zines, elle publiera une sélection de dessins anthropomorphiques explorant les effets de l'insularité sur la biodiversité florale et les corps à Porto Rico avec l'irruption de la valorisation et de la capitalisation des systèmes reproductifs.