Marie-Anita Gaube

Dossier mis à jour — 13/01/2021

Né⋅e en 1986

Vit et travaille à Tours (Indre-et-Loire)

/

« Parce qu’une foule d’histoires peuple son imaginaire, Marie-Anita Gaube a fait très tôt le choix de la peinture dans son versant le plus figuratif. Depuis ses débuts en 2012, l’artiste développe une œuvre picturale vivante et colorée, vibrant de mille détails qui se déploient sur les grands formats qu’elle privilégie pour mieux nous immerger dans son monde. Un monde édénique où tout semble n’être qu’un appel aux joies de l’existence : nature luxuriante, palmiers et oiseaux de paradis, cascades féériques, lacs transparents et bains de soleil, constituent le cadre récurrent de scènes idylliques.

Sous ces cieux sans nuage règne pourtant une profonde intranquilité. Les compositions mouvementées et les rythmes chromatiques ne laissent jamais le regard en repos. Ne craignant pas le trop plein, la peinture déborde d’événements ou de détails inattendus dans chaque recoin de la toile.

Comme l’artiste aime le souligner, chacun de ses tableaux en contient toujours plusieurs. Elle semble faire de cette hétérogénéité la matière même de ses compositions dynamiques qui relient les personnages, les objets, les motifs colorés ou les paysages dans un faisceau de narrations enchevêtrées. La surface de la toile devient le lieu de coexistence d’univers multiples. Il peut y faire simultanément jour et nuit. L’espace de la maison s’ouvre au paysage, comme si les frontières entre intérieur et extérieur n’existaient plus. Les points de fuite se démultiplient, les différents plans se juxtaposent tels des écrans et s’imbriquent dans de complexes constructions qui déplient l’espace de la représentation.

En reliant ces mondes épars, Marie-Anita Gaube en accueille les contradictions et les tensions. Animée d’une indéniable énergie vitale, son œuvre semble aussi traversée d’inquiétudes plus souterraines. Quelque chose d’étrange émane de ces personnages saisis dans des postures aux tonalités obscures, de ces corps un peu perdus dans le paysage qui parfois les absorbe jusqu’à les faire disparaître. La présence de natures mortes posées comme des Vanités, de masques ou de statuettes hiératiques, résonne avec les préoccupations les plus archaïques d’une humanité confrontée à sa finitude.

Dans la galerie noire du CCC OD, l’exposition Odyssées nous mène dans l’exploration du monde inventé par Marie-Anita Gaube, qui nous aide peut-être à aborder le nôtre différemment. Ses œuvres ne sont pas que des rêves lointains, elles empruntent aussi à une réalité partagée que nous reconnaissons par bribes. Pour l’artiste, ses peintures sont des hétérotopies, telles que les définissaient Michel Foucault : des « espaces autres » inscrits dans la réalité plus que dans un rêve utopique. Habiter son imaginaire n’est pas une stratégie de fuite ou de repli, mais bel et bien une réponse au monde qui nous entoure. »

Odyssées, texte de Delphine Masson
Pour l’exposition de Marie-Anita Gaube au CCC OD de Tours, 2020