Textes
TRAGIQUE
Par Thierry Raspail, 2013
Catalogue de l'exposition Blow Up, Musée d'art contemporain de Lyon, Liénart Éditions
TRAGIQUE
Par Thierry Raspail, 2013
Catalogue de l'exposition Blow Up, Musée d'art contemporain de Lyon, Liénart Éditions
JANUS
Par Anne Bertrand, 2013
Catalogue de l'exposition Blow Up, Musée d'art contemporain de Lyon, Liénart Éditions
JANUS
Par Anne Bertrand, 2013
Catalogue de l'exposition Blow Up, Musée d'art contemporain de Lyon, Liénart Éditions
Janus est le dieu des seuils. Ils s'ouvrent ici sur un vertige. Rien n'est simple : chaque œuvre de Philippe Droguet procède/se joue en deux temps, contraires. 1
L'artiste propose à la fois cette tension dynamique et son dépassement (plutôt que sa résolution). D'où le choix du titre de l'exposition du macLYON, au printemps 2013 : Blow Up, en hommage évident au film d'Antonioni. Dans chaque image se cache une autre image, à découvrir.
En puissance
Or le parcours de l'artiste est d'un seul tenant. Sa détermination frappe, dès le commencement. Philippe Droguet ne saurait être autre chose qu'artiste.
Cette première exposition d'importance dans un musée réunit des pièces créées ces dernières années (depuis 2000 jusqu'en 2013), qui conservent en partie la mémoire du travail entamé à la fin des années quatre-vingt 2, voire avant, lorsqu'il fait le choix de s'inscrire aux Beaux-Arts de Mâcon. 3
Ainsi, Entretien (2000-2001) résume tout un pan de son œuvre antérieur, caractérisé par l'emploi en sculpture d'un matériau singulier. "Entretien est constitué de divers éléments disparates reliés entre eux par une sorte de cordon ombilical dans lequel circule un flux électrique. Ce courant alimente une lampe de bureau dirigée sur une chaise lui faisant face. L'ensemble est recouvert d'une matière organique, la vessie de bœuf, récupérée aux abattoirs [...]. La vessie [...] enveloppe [le dispositif] d'une peau, ce qui lui confère une dimension anthropomorphique renforcée par l'articulation en réseau des différents organes qui le composent." 4 L'œuvre appartient au macLYON depuis 2004. Sa fiche technique précise que la lessiveuse faisant office de poubelle, auprès du bureau, est remplie de bitume qui, "au contact de [la chaleur dégagée par] l'ampoule [...], fond et dégage une odeur entêtante".
'emblée, certains éléments fondamentaux sont posés, qui vaudront désormais pour la plupart des pièces. Lorsqu'elles se fondent sur l'usage d'objets familiers, ceux-ci seront transformés, altérés, pour produire un effet de l'ordre de ce que l'on nomme en anglais uncanny, Unheimlich en allemand, le français ayant curieusement besoin de deux mots pour qualifier l'"inquiétante étrangeté". Celle-ci renvoie presque forcément à l'imaginaire surréaliste, référence que reconnaît l'artiste, la précisant lorsqu'il cite, proche de la revue Documents, le photographe Eli Lotar, pour sa série des Abattoirs (1929). Intervient aussi l'esprit du ready-made inventé par Duchamp, ce qu'il assume évidemment. L'art de Philippe Droguet dès l'origine est réfléchi, cultivé – même s'il peut aussi se voir, se lire sans un recours obligé à une histoire de l'art moderne et contemporain qui le nourrit, qu'il prolonge. 5
Entretien montre comment il aborde les notions de sculpture et d'installation, traite l'objet, le matériau, enfin suggère, sans l'imposer, un sens parmi ceux qui pourront apparaître aux yeux/dans l'esprit des spectateurs. Un entretien suppose au moins deux interlocuteurs, il est clair ici qu'un rapport de force régit leur relation, l'un, soumis au pouvoir de l'autre, doit répondre à ses questions. Il s'agit des conditions de l'exercice d'un pouvoir, du décor et des moyens d'une pression, violence. L'idée de torture affleure. L'enjeu de la pièce est dans sa charge. Tous nous savons ce que sont un bureau, une lampe, une chaise... Tous nous pouvons imaginer l'abattage en série des bêtes, leur dépeçage, le sang, les restes, la puanteur. Tous nous avons en tête l'image plus ou moins vague, associée à une histoire récente, à des faits actuels, d'interrogatoires à l'issue dramatique. Entretien doit sa force autant à son efficacité formelle qu'à sa puissance d'évocation.
Le même principe est à l'œuvre dans Cadeau (2000-2001) – baignoire pour fakir ? Qui sait comment l'artiste en est venu, partant de cet objet trouvé qu'était une baignoire en fonte Belle Époque aux flancs peints vert pâle, ornés de roseaux, à recouvrir (à nouveau) l'intérieur de clous appelés "semences de tapissier". Après l'intuition, l'impulsion, vient le temps de réalisation, pas infini mais presque, des mois à coller une à une chaque pointe à côté des précédentes, pour que pousse sur cette forme à peine animale (ses pattes de lion) un pelage d'un noir brillant, fourni, qui fascine et met le spectateur au défi de toucher, caresser ce qui ne peut, acéré, que blesser. Cadeau, tout d'attraction/répulsion, eût ravi Meret Oppenheim. Il rappelle, autres temps, autres lieux, Under the Skin (1994) de Tony Cragg, œuvre héritière elle aussi de fétiches du Congo, au XIXe siècle.
Une dimension nouvelle apparaît avec la série des Tombés (2003-2005). Le sens du toucher y est sollicité autant que celui de la vue, le principal tenant pourtant à l'image créée pour le spectateur, à la perception qu'il peut en avoir. Ces drapés blancs, lisses, savants, évoquent autant le tissu que le marbre, l'art que la nature. L'un posé sur une palette à la verticale, l'autre débordant d'une bassine au fond rouillé, ils font un hommage à la sculpture baroque du Bernin comme à tant de dessins, toute une tradition classique, Ingres... Ce legs subverti par l'effet de trompe-l'œil, le trouble né d'une texture opaque et translucide à la fois, qui intrigue et ne se laisse pas reconnaître. "La paraffine [explique l'artiste] passe à l'état liquide avant de se figer. Elle peut être moulée ou appliquée sur un support en fines couches, comme le plâtre." 6 Il dit aussi : "[Elle] fossilise la vie dans les plis [...]." 7 Les Tombés valent également pour ce qu'ils introduisent l'idée, féconde, de variation.
Dès ses débuts, l'artiste instaurait un mode de travail patient, une discipline, une persévérance. Cette ascèse le soutient ; elle fait partie de son identité.
En souffrance
Dans l'atelier le travail se développe, évolue. L'endroit est essentiel à l'artiste, qui y mène recherches, expérimentations, production 8, en parle comme d'un "laboratoire", un "chantier".
S'y pose la question du rapport entre l'ordre et l'invention, à laquelle il répond : "Le contexte dans lequel j'ai évolué dans ma toute première jeunesse n'était pas étranger à une certaine conception de l'ordre, de la rigueur ou encore du contrôle. Je viens d'un univers formaté, militarisé, celui dans lequel travaillait mon père.
Ce vivier dans lequel j'ai mariné jusqu'à mon adolescence aurait pu être fatal pour mon épanouissement personnel si l'éducation parentale ne s'était pas juxtaposée à ce quadrillage savamment délimité. Mes jeunes parents [...] se comportaient bien souvent de façon décalée, surprenante, et provocante à bien des égards ; souvent dans un total esprit d'inconscience. Je pense que mon travail s'est développé sur ce type de schéma. D'un côté, l'ordre et la rigueur comme canevas, de l'autre des jeux de perturbations aptes à créer des surprises ou encore des décalages. La séduction apparente des objets et des installations ne s'établit qu'à partir d'une palette lisse et ordonnée, plutôt familière. Ce qui m'intéresse, en somme, c'est de créer des microfissures, des failles dans des dispositifs plutôt conventionnels, pour en interroger les fondements." 9
Regarder, voir, même, scruter les œuvres, ne saurait être inutile pour ce qu'elles expriment du vocabulaire de l'artiste, de sa syntaxe, de son langage. Importent bien sûr le choix des matériaux, le processus de réalisation des pièces et leur présentation dans l'espace, y compris pour les rapports entre elles... mais il est vite évident que le souci formel de Philippe Droguet va de pair avec sa préoccupation d'un contenu, du sens de ses créations. "Les titres ne sont jamais anodins. Ils fonctionnent en général comme un signe supplémentaire capable d'ouvrir ou d'infléchir le sens de l'œuvre [...]. La relation du titre à la proposition plastique partage la même complémentarité que celle existant entre le matériau et la forme, sans toutefois en oblitérer l'autonomie. [...]
En fait, je ne peux concevoir une pièce sans penser à son contenu potentiel. La forme pour elle-même ne m'intéresse pas. Elle est envisagée plutôt comme véhicule d'une "pensée en acte". Mon rapport au langage est un rapport tendu. Je cherche à atteindre une certaine précision dans l'articulation des codes et des signes." 10
Marine (2003-2005) participe du même procédé d'hybridation qu'avant elle Cadeau : une branche morte, dans l'élan de sa courbe, dessine un animal courant. Hérissée de centaines de cure-dents, elle offre à l'œil un pelage épais, fauve. Au bout, un crâne de renard est greffé. La bête trotte et file au sol, un socle de métal la met à hauteur des yeux, nous confronte à la cruauté des orbites creuses, à l'aigu de l'os, dents serrées. Il y a peu, l'artiste l'a dotée d'un collier de métal doré qui lui donne un côté bling-bling. Se méfier de la séduction qu'elle peut exercer. L'évolution politique en France ces dernières années ne fait que confirmer la menace initialement décelée, le danger de la créature, qui va, inexorable.
Dans un autre registre, Y-z-s-o-k-a-r (2005-2007), chimère anagramme, se distingue d'abord par son élégance. Une autre branche en est l'âme, debout sur trois pieds grêles, se rejoignant en un tronc mince, enduite à mi-hauteur de plâtre et de gesso, qui se termine, mi-torse, mi-tête, par un crâne de bovin surmodelé. Bizarrement on songe à un animal sous-marin, espèce de poulpe jailli hors de l'eau, face à nous, apparemment fragile et néanmoins solide sur ses extrémités. Il y a là une délicatesse étroitement combinée à une image de mort redoublée, animale/végétale, qu'accentue l'aspect nu des matériaux – squelette jamais vu, danse macabre à soi seul.
Quant au triptyque (1-2-3), en 2008, il rappelle que le sculpteur est aussi, depuis longtemps, peintre, qui cite, parmi les quatre artistes pour lui cardinaux, avec Brancusi, Beuys et Nauman, Pollock. Mais si la relation qu'entretient l'œuvre avec le maître du dripping s'impose, dans le lacis serré, dense, à la surface, Philippe Droguet parle ailleurs du Carré blanc sur fond blanc de Malevitch, des Achromes de Manzoni, de Ryman. (1-2-3) surtout manifeste autrement que dans de précédentes pièces l'intérêt de l'artiste pour ce qu'il nomme le "tégument". Il s'agit d'"une membrane qui enveloppe et qui protège le vivant et, par extension, d'une fine paroi entre l'intérieur et l'extérieur, qui simultanément révèle et soustrait au regard". L'œuvre est parente d'une autre, Antalia (2008), qui tient son nom du médium employé, originellement conçu pour les routes, la nuit. "[Dans le cas de (1-2-3)] la texture micro-granuleuse de la peinture la rend littéralement instable puisque [elle] a la particularité de réfléchir la lumière dans l'axe de son rayonnement. Il suffit que le spectateur sorte de cette trajectoire pour que l'éclat de la blancheur disparaisse au profit d'un blanc mat et terne." 11 Comme ses illustres aînés, Philippe Droguet affronte le monochrome blanc. Une fois encore il met le spectateur au défi, exigeant de lui une curiosité, une attention soutenue, un investissement sans lequel il pourrait bien ne rien voir/percevoir du raffinement sauvage, de la subtilité de l'œuvre – tout, ou rien.
En majesté
Une violence mine l'esthétisme des pièces, donnant à qui les voit, dans la plupart des cas, l'impression d'une agression potentielle ou passée. "Je veux [dit l'artiste] créer une présence forte capable de déclencher chez le spectateur une émotion porteuse de sens. Je veux induire une gêne, un doute, et susciter des réactions paradoxales. Je veux que le dispositif mis en œuvre soit comme un écho, une résonance au contexte sociopolitique dans lequel il est produit ; que le contexte sous-tende le travail, le nourrisse, sans pour autant lui conférer une dimension narrative. [Il y a bien une alternance entre douceur et violence dans mes sculptures], l'alternance de la douche écossaise, chaud/froid, comme un écho tangible à la violence du monde." 12
Les panneaux de Rit (2009-2012), carrés, petits, montrent le net impact dans du plomb de balles de 11/43 – pour faire taire qui, éliminer quoi ? On croit entendre à chaque fois la déflagration, sa sécheresse définitive, quand on ne saurait concevoir celle, unique, lointaine, fracassante, de Big Bang (2011). L'œuvre évoque avec brio l'idée du commencement de tout – d'où son installation, sentinelle brillant de tous ses feux, à l'entrée de l'exposition.
Au contraire, avec Aurore (2010) et Vénus (2011), il s'agit d'un étouffement. La paraffine s'applique cette fois sur un/des coussin(s). Aurore a quelque chose d'élémentaire, frontal... quand Vénus alterne gonflement, pointes dressées, épiderme marmoréen et prolifération stoppée – sculpture féminine résultant d'un fantasme masculin comme autrefois certaines pièces de Duchamp (Prière de toucher, 1947), ou comme des sculptures masculines de Louise Bourgeois résultent d'un fantasme féminin.
Quant à Vectan (2011), le projet, assourdi, a son origine il y a longtemps, dans une pratique de l'artiste alors étudiant en école d'art. Il aurait dû prendre une forme plus complète, qu'il prendra peut-être un jour : celle d'un environnement constitué de panneaux analogues aux deux présentés, plongeant le visiteur dans l'atmosphère étrangère d'une black box aux parois veloutées, noir complet, murs de poudre – pas n'importe laquelle : la "vraie" poudre de cartouches, explosive, offensive. Une fois encore, donc, danger, partout, tout contre.
Battes (2012) surprend par son aspect cartoon, pop. La pièce est faite de "chaussettes, bois et plâtre de moulage". Chaussettes, pourquoi pas, après lampe de bureau, baignoire, cure-dents... Mais chaussettes non seulement noires ou grises : jaune poussin, rose bonbon, bleu ciel, vert pomme, à rayures, à losanges, à motifs, des personnages de dessin animé, l'univers Disney ?!? Ce décrochement inattendu réjouit chez un artiste jusqu'ici très straight, adepte d'une économie stricte des matériaux, des couleurs. "C'est pour mieux te manger, mon enfant", répond le loup du conte. Qui dit Battes dit coups, et non seulement jeu, sport, surtout de ce côté de l'Atlantique où le base-ball, sa culture, nous sont moins familiers. Battes dont la forme aurait pu demeurer bénigne, mais par son usage, s'avère meurtrière – ici multipliée. L'œuvre peut s'exposer de deux façons au moins. Chacune debout sur son socle de bois carré, l'ensemble formant masse ; ou bien en tas, couchées, au sol : un désastre ? Une troisième option serait de les aligner, de rapprocher de l'autre chacun des pieds dans sa chaussette. Effrayante, effroyable armée de membres amputés – tous conflits d'aujourd'hui.
Évoquant l'œuvre de Philippe Droguet dans sa préface à ce catalogue, Thierry Raspail y voit une "beauté tragique" à laquelle l'artiste souscrit.
Couvre-feu (2013) est l'une des dernières pièces qu'il ait produites et l'une des plus importantes montrées à Lyon, magistrale. Elle se présente sous la forme énigmatique d'une double, longue rangée de nichoirs à oiseaux, simples boîtes de bois brut, chacune son trou rond ou carré, toutes les mêmes, ou presque, alignées au même niveau, en hauteur, occupant tout un pan de mur d'une présence modeste, répétée, fantomatique. Car il n'y a plus d'oiseaux. On ne sait pas si c'est depuis longtemps, combien il pouvait y en avoir ni pourquoi ils ont disparu, dans quelles circonstances. L'œuvre est en deux parties, la seconde bien plus discrète, que l'on risque même de manquer : une ardoise d'écolier est accrochée elle aussi assez haut, sur une paroi perpendiculaire ; elle porte quelques chiffres tracés à la craie, une sorte d'opération dont le sens demeurera crypté. Voilà ce que l'on peut voir.
On peut rapprocher cette pièce d'une image récente elle aussi, qui faisait le carton de la précédente exposition personnelle de l'artiste à la galerie Pietro Spartà, au printemps 2012. Parmi cinq autres, une perruche bariolée, vert vif, jaune vif, bec rouge-orangé, encapuchonnée de noir (à la différence des autres, plus pâles, et de profil), vous regardait en face. L'ensemble avait pour titre Witness. On peut y repenser – ou pas.
On peut enfin avoir la chance d'entendre Philippe Droguet raconter que, pendant quelques années, il a travaillé dans son atelier juste à côté d'un élevage de ces oiseaux : de l'autre côté du mur, leur pépiement, leurs chants, tout le jour – ce son, cette musique, cet accompagnement constant. Cette présence d'un autre invisible, parlant une langue inconnue, pas un bruit de fond, une vie multiple, cette adresse reçue, laissée sans réponse ? Sauf qu'un jour l'éleveur meurt, les oiseaux sont vendus, très vite tout se tait. Ne restent que ces habitats déserts, et le silence, le souvenir. La cité n'existe plus quand ceux qui la peuplaient s'en vont. L'image demeure de ces maisons vides, chacune son trou noir. La rejoint le poids d'un silence lourd de tous les chants passés, toutes les voix distinctes, révolus. Du fait de cette pièce, la présence voisine n'a pas disparu. Elle est la trace d'une histoire, l'évocation du politique. Une forme d'archive, éloquente de sons, d'une vie, perdus.
-
— 1.
"Une bonne partie de mes œuvres fonctionne sur ce mode paradoxal, jouant précisément des ambivalences ou des antagonismes entre des aspects contradictoires. La forme proposée est élaborée sur le modèle d'une chose plutôt familière, masquée par des effets de matières – douces, soyeuses, irisées, étincelantes – que l'on aimerait approcher, même toucher. La première lecture est faussée par l'aspect trompeur de la surface. Il faut regarder de plus près et à deux fois pour comprendre la véritable nature de l'objet. Il y a un décalage entre l'image annoncée et la réalité de ses constituantes. Un leurre pour la vue, qu'il suffit d'interroger pour en comprendre toutes les articulations." (Entretien par mail de l'artiste avec l'auteur, du 12 mai au 16 juin 2013)
-
— 2.
Cf. Philippe Droguet. Matière à doute, catalogue de l'exposition du centre d'Art contemporain de Lacoux, textes d'Anne Bertrand et Philippe Grand, coll. Varia, Fage éditions, Lyon, 2006.
-
— 3.
"1984 fut un moment très important pour moi puisqu'il marquait la fin de mon adolescence et le début d'une engagement sur la voie que j'avais choisie. Cette décision était d'abord et avant tout motivée par le fait de vouloir quitter un environnement bien trop circonscrit, qui laissait entrevoir peu d'ouverture sur le monde, mais aussi de rompre avec un schéma de vie, pour mener celle que j'avais décidé de vivre. Sans connaître véritablement ce qu'était le monde de l'art, je me sentais irrésistiblement attiré par le peu que j'en connaissais alors.
Le premier artiste que je rencontrai grâce à l'école [des Beaux-Arts de Mâcon] fut Daniel Buren. [...] Luciano Fabro et Richard Deacon furent parmi les suivants [...] Du côté de la théorie, je me souviens avoir été très impressionné par une conférence sur l'Arte povera donnée par Germano Celant, répondant à l'invitation de Jean-Louis Maubant au Nouveau musée de Villeurbanne [...].
Dès 1989, j'ai eu l'opportunité de participer au montage de l'exposition "La Couleur seule. L'expérience du monochrome" au musée d'art contemporain de Lyon. Non seulement j'y rencontre Thierry Raspail et Thierry Prat, assiste à une intervention de Maurice Besset [commissaire de cette exposition], mais je découvre de très près des œuvres majeures du XXe siècle. Je suis définitivement conquis et sais à ce moment-là que je serai, sans aucun doute, artiste." (Ibid.) - — 4.
-
— 5.
"Ma culture visuelle m'a permis au fil des années de dresser la cartographie d'un paysage qui constitue l'arrière-plan de mon travail. Cet arrière-plan fonctionne comme une matière en tant que telle. Je parlais [...] des associations d'idées possibles autour d'un matériau, et aussi de la façon dont ces associations sont contenues ensuite par la forme issue d'un processus. Je peux dire en quelque sorte la même chose concernant une "histoire de l'art proche", à savoir celle peinte en toile de fond par Duchamp, Bataille, Painlevé, Lotar, Dali... sur laquelle vient se superposer, dans une sorte de fondu-enchaîné, une deuxième [histoire] qui pourrait cette fois comprendre des artistes plus contemporains, tels que Beuys, Louise Bourgeois, Cragg..., puis une troisième... [...]
Je suis resté bouche bée devant certaines installations de Beuys sans en comprendre véritablement le sens, touché par la puissance de l'œuvre et interrogé par la singularité des dispositifs et des matériaux. Les œuvres de Louise Bourgeois m'ont intéressé pour leur forte charge érotique et par le rapport que la forme entretient avec le contenu, mais gêné toutefois par leur dimension autobiographique parfois trop prégnante. Aussi par la parenté de certaines avec le travail de Brancusi, pour lequel j'ai un intérêt particulier, [étant donné] sa quête acharnée pour extraire, à travers des matériaux d'une grande sensualité, l'essence des choses – ce qu'on retrouve dans certaines œuvres de Penone, notamment la série des Arbres." (Entretien par mail de l'artiste avec l'auteur, op. cit.) - — 6.
- — 7.
-
— 8.
"[Le matériau] a toujours été plus ou moins un déclencheur du travail à venir. [...]
En fonction d'une idée que je veux développer, j'opte pour un ou plusieurs matériaux. Ensuite ces mêmes matériaux me fournissent une palette d'informations que je combine avec des références littéraires ou historiques, philosophiques ou encore iconographiques ; palette qui me permettra ainsi d'élaborer une "pensée en images"." (Entretien de l'artiste avec Hervé Percebois, op. cit.) - — 9.
- — 10.
- — 11.
- — 12.
PAR-DELÀ, EN DEÇÀ, LA SURFACE
Par Hervé Percebois, 2013
Catalogue de l'exposition Blow Up, Musée d'art contemporain de Lyon, Liénart Éditions
PAR-DELÀ, EN DEÇÀ, LA SURFACE
Par Hervé Percebois, 2013
Catalogue de l'exposition Blow Up, Musée d'art contemporain de Lyon, Liénart Éditions