Christine Crozat

Dossier mis à jour — 18/12/2023

Vit et travaille à Lyon et Paris

Représenté·e par la Galerie Françoise Besson, Lyon
et la Galerie Éric Mouchet, Paris

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“Nous coexistons sans le savoir avec d’innombrables vestiges encore enfouis, et c’est ainsi qu’une grande partie du passé continue à exister autour de nous et se révèle par fragments ou s’évanouit discrètement. L’histoire et l’histoire de l’art, qui en sont les discours construits et transmis, nous mettent en contact avec une longue chaîne d’êtres humains dont les décisions ont entraîné une succession d’événements qui nous conditionnent aujourd’hui. Les œuvres de Christine Crozat assument ce rôle de transmetteur, enregistrant et conservant la mémoire des choix, des histoires et des actions menées. La conservation différentielle et le fait que les matériaux qu’elle utilise soient inégaux dans leur résistance face aux siècles constituent un phénomène captivant car il témoigne, comme le fait l’artiste, de la partialité de la mémoire. C’est bien la fragilité extrême de ces objets qui rendent ses œuvres plus saisissantes encore. Cela expliquerait son usage récurrent de matériaux organiques et frêles tels que des papiers japonais d’une finesse extrême, la cire d’abeille ou encore les fleurs qu’elle prélève sur son chemin et qu’elle laisse sécher dans ses herbiers. Elle collectionne et modèle ainsi des fragments du vivant qui n’appartiennent à aucune autre mémoire sinon la sienne, qu’elle tente d’extraire du temps en créant de nouveaux vestiges. […] Cette persistance de la présence évoquée par la trace et le vestige est une image qui exprime la puissance de l’incarnation dans les œuvres de Christine Crozat. Sur le papier, elle a commencé à redonner forme et relief à ces chaussures en creusant l’épaisseur de la feuille, par le revers, en creux et en bosse, comme pour en révéler la présence fantomatique, appliquant ainsi au papier une empreinte réalisée dans une technique qui n’est pas sans rappeler la documentation des fossiles et des inscriptions sur les pierres, quand on presse une feuille sur un relief que l’on crayonne au graphite. […] Cette forme d’empreinte du corps et du pas est une image qui prolonge en quelque sorte les pratiques artistiques de Christine Crozat, qui s’exprime à travers divers procédés : moulages de terre et de résine, soufflage de verre, par ses collections de savons usagés ou encore ses découpages au scalpel.”

Extrait de Celle qui marche en avant, par Matthieu Lelièvre
Publié dans Christine Crozat, monographie parue aux éditions In Fine, Paris, 2021