Textes
Pierre, feuille, ciseaux
Par Sonia Recasens, 2022
Pierre, feuille, ciseaux
Par Sonia Recasens, 2022
Quand Gaëlle Foray réveille les morts avec ses pierres à images
Par Pascal Pique (Musée de l'invisible), 2018
À propos de l'exposition « Pierres de visions », CAIRN/Musée Gassendi, Digne-les-Bains
Quand Gaëlle Foray réveille les morts avec ses pierres à images
Par Pascal Pique (Musée de l'invisible), 2018
À propos de l'exposition « Pierres de visions », CAIRN/Musée Gassendi, Digne-les-Bains
Eux, c'est nous (les minuscules mains)
Par Vidya Gastaldon, 2016
Eux, c'est nous (les minuscules mains)
Par Vidya Gastaldon, 2016
Accroupie par terre, dans l'atelier de Gaëlle, de toutes petites mains m'agrippent les chevilles, les hanches, les épaules puis remontent le long de mon cuir chevelu. De petites mains humaines plates, découpées au scalpel, pas plus grosses que des grains de riz mais dont les ongles précis me transpercent. Les mains d'une dame blonde devenue brune, puis à nouveau blonde puis blanche puis... les mains de son mari, de son nouveau mari, de sa fille, de son gendre, de ses petits-enfants avec des pyjamas sales. Les mains de ses chiens, morts sans doute.
Tout est là ; la persistance de l'odeur du skaï du canapé, le goût un peu rance des biscuits apéritif, la texture lisse et rassurante du pelage du chien, le motif de fleurs tropicales des coussins beiges. Ce bouquet de fleurs sur la table basse : des glaïeuls, puis des tulipes, puis des glaïeuls et ainsi de suite. Les pulls angoras tricotés main se répètent eux aussi comme les petites mains, comme les bouquets, comme ces visages inconnus mais déjà trop familiers, visages légèrement flous souriant à l'objectif de leur vie, mis en perspective dans une fractale sans fin.
Une fractale évoquant la théorie des univers multiples comme dans le collage Le salon où le long canapé en skaï noir s'enroule sur lui-même comme un boudin orobouros, comme un ténia cosmique avide, avaleur de gens, avaleur de temps « on l'a gardé 35 ans ce canapé ». La vie d'un canapé... presque la moitié d'une vie humaine.
Gaëlle Foray récupère les dernières mémoires développées chimiquement dans les laboratoires.
Aujourd'hui, on jette une carte micro HD, un disque dur externe obsolète ou on abandonne simplement nos mémoires numériques là où elles sont, déjà pulvérisées dans d'immenses cercueils de Big Data. Elle prend en charge la matière de ces albums poussiéreux exhibant des vies qui pourraient être les nôtres, ces vies banales et vite oubliées malgré la splendeur des mises en scène domestiques d'alors : tous alignés sur le canapé, tous à table du même côté un peu cachés derrière les bouteilles de rosé. On (on car eux c'est toujours nous) se couve les épaules réciproquement avec nos minuscules mains pleines de petits ongles, on se détache et on reprend déjà son verre pour continuer le Repas sans fin. Ces souvenirs déjà passés et repassés dans tellement de filtres (la réalité, la vie, le regard, l'objectif, le choix, le laboratoire, le deuxième choix, la pochette, le cadre, l'album, l'abandon...) ne perdent rien de leur puissance vibratoire, même recomposés dans les choix de Gaëlle ; son scalpel découpe et décuple.
Le dîner des vieux est beau comme une scène de Miyasaki. La porcelaine tremble, les lumières des lustres dégoulinent. On se dédouble dans l'ivresse, les yeux brillants, les cheveux blancs, très dignes et souriants devant notre devenir fantomatique. Déjà entouré de notre Aura de l'Au-Delà. L'Au-Delà nait dans les petits salons de province des années 80's.
Et puis il y a dehors, la plage, la montagne : La sortie du dimanche, Le Parc d'attraction, La Zone de vacances, Toujours plus loin, comme dans Dragon Ball Z : à skis sur une boule de neige flottant au dessus d'une mer turquoise, on s'en fout de l'environnement, c'est nos congés, on l'a bien mérité. Gaëlle Foray évoque alors JG Ballard dans sa période post-apocalyptique (Sècheresse) mais aussi dans ses ambiances de sadisme capitaliste de bord de mer : voitures de course érotiques échouées dans les clôtures, vacances trop courtes dans des îles de béton, nature idéale prise entre un tas de gravats de chantier et un buffet.
Le buffet servi pour les im-puissants de ce monde complotant en costards au milieu des fleurs des champs. Un buffet dont s'échappe peut-être déjà cette ravissante jeune femme enfourchant une rutilante moto sur le sable du temps. Elle, c'est la fille de la dame du canapé-uni-vers de skaï. La dame qui un matin de 2012 est allée jeter à la déchetterie 20 albums photo, sa vie soigneusement mise en page. Un « reset » presque aussi héroïque qu'un départ définitif pour un ashram ou la décision d'appuyer sur le bouton « Exit » dans une clinique Suisse.
L'étreinte
Par Blandine Gwizdala, 2017
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