Guillaume Perez
Dossier mis à jour — 21/05/2025

Textes

Texte de Guillaume Perez

2025

La peinture n’est pas une surface close, c’est un élément en interaction avec l’espace.

Elle ne se limite pas à l’application de pigments sur un support, elle s’étend, se fragmente, se suspend, se déploie dans l’architecture qui l’accueille. Dans mon travail, elle prend des formes souvent géométriques et minimales, que je fais dialoguer avec les structures environnantes, jouant sur des rapports de tension entre plan, volume et couleur. L’accrochage y est une donnée essentielle : c’est le moyen d’activer les œuvres par leur placement et leur mise en relation.

Certaines pièces paraissent en équilibre, d’autres sont suspendues, fixées au mur comme pour souligner le poids de la peinture en tant qu’objet. L’espace est un élément constitutif de la composition : un panneau coloré peut résonner avec une fenêtre, une grille, un cadre architectural, créant ainsi des connexions formelles qui dépassent le tableau lui-même. Mais ces relations restent fragiles, toujours sur le point de se reconfigurer ou de se dissiper. La couleur joue un rôle fondamental, non pas comme simple effet visuel, mais comme un principe structurant. Elle se décline en aplats vibrants, parfois monochromes, parfois stratifiés en couches qui laissent entrevoir leur propre processus d’apparition. La lumière, naturelle ou artificielle, interagit avec ces surfaces, modifiant la perception des œuvres au fil des déplacements du regardeur. Ce qui est donné à voir semble à la fois présent et insaisissable, pleinement affirmé et pourtant en retrait. Ce rapport entre présence et absence est au cœur de mon travail. La peinture, en jouant avec son support et son accrochage, suggère autant qu’elle montre, retient autant qu’elle dévoile.

L’artiste ne semble jamais tout à fait là : ses gestes s’effacent dans la précision du tracé, dans la neutralité apparente des formes. Le corps du spectateur devient alors la seule présence tangible, traversant ces compositions silencieuses, éprouvant leur équilibre instable. Ce vide ne serait pas une absence, mais un espace actif, un lieu d’attente où la peinture se donne par fragments, laissant au regardeur la possibilité d’une reconstruction mentale. L’exposition se présente alors comme un espace en mouvement, où chaque élément – peintures, objets, architecture – fonctionne comme un fragment d’un système en constante recomposition. La peinture n’y est jamais figée, elle épouse l’espace, le redessine, le reconfigure, créant un équilibre fragile entre structure et instabilité. Mais cet équilibre est peut-être traversé par une forme de mélancolie : celle d’un langage pictural qui ne cherche pas à s’imposer, mais à exister à la lisière du visible, entre apparition et retrait.

Pavillon

Par Leïla Couradin, 2018
Publié dans la revue Artaïs à l'occasion de l'exposition Pavillon à l'INSA Lyon, en partenariat avec l'Institut d'art contemporain, Villeurbanne/Rhône-Alpes