Texte de Jean-Paul Felley & Olivier Kaeser
Texte de Jean-Paul Felley & Olivier Kaeser
Pour l'exposition Floating Bowl, attitudes, Genève, 2003
Floating Land est "une micro nation souveraine et indépendante destinée à la diffusion de créations actuelles, orientées vers des problématiques d'auto-gérance, de réseau, de survie, de défense et de nomadisme". Depuis 2000, Sophie Dejode & Bertrand Lacombe imaginent ce territoire autonome sous la forme d'une île flottante mobile, transposable sur divers plans d'eau susceptibles de l'accueillir. Floating Bowl est l'événement organisé par Dejode & Lacombe au sein de Floating Land, pour lequel ils convient d'autres artistes à collaborer à la mise au point d'un système auto-généré. Floating land est pensé comme un lieu d'accueil, de vie, de convivialité pour une collectivité artistique.
Dans cette logique, pour leur exposition à attitudes, Dejode & Lacombe ont invité quatorze autres artistes - ou, comme eux, duos d'artistes : Virginie Barré, Sophie Bueno, Xavier Chevalier, Aïcha Hamu, L/B, Stéphane Magnin & Emilie Maltaverne, Arnaud Maguet, Olivier Millagou, Petra Mrzyk & Jean-François Moriceau, Naoko Okamoto, Bruno Peinado, Niels Trannois, Thierry Xavier, Shingo Yoshida.
Ils ont choisi ces artistes par affinité, tant humaine qu'artistique. Leur enthousiasme et leur engagement poussent cette proximité d'esprit également dans deux directions différentes : d'une part, les artistes invités agissent dans un territoire configuré par Dejode & Lacombe, et tous partagent temporairement la nationalité "floating landaise", ce qui donne un caractère communautaire à l'exposition. D'autre part, Dejode & Lacombe ont attisé les rivalités tacites qui animent le microcosme de l'art contemporain, en proposant une compétition de mini motos, dont les compétiteurs sont les artistes participant à l'exposition. Auparavant, chacun d'entre eux aura réalisé l'habillement visuel de la carrosserie de sa moto. Cette course ne comporte aucune règles préétablies. Un jury, composé de critiques d'art et de responsables d'institutions artistiques, est appelé à déterminer les critères à partir desquels le ou les vainqueur(s) seront désignés. Place donc à la vitesse, à la ruse, au style, au look, aux alliances, aux tricheries, à l'élégance, à l'humour...
À l'issue de cette compétition, Dejode & Lacombe réaliseront le Robot force, une sculpture représentant une figure post-humaine composée de l'assemblage des carrosseries des mini motos. Cette œuvre prendra place dans une exposition extrêmement dense, déjà jalonnée par la présence d'une montagne en bois dans laquelle on peut pénétrer, d'un sous-marin réalisé à partir d'un bus VW ou encore d'une unité d'accueil construite à partir d'un bunker individuel et d'une cuve industrielle.
La plupart des artistes de Floating Bowl sont nés dans les années 70, sont français, n'habitent pas Paris et ont souvent exposé ensemble. Certains d'entre eux ont déjà un parcours riche et identifié, d'autres sont artistiquement plus jeunes. De manière générale, ils se nourrissent abondamment de culture populaire (cinéma, musique, bande dessinée, jeux vidéo, graphisme) et puisent de nombreuses références dans les années 60, 70 et 80. Leurs pratiques relèvent le plus souvent de la citation, de l'appropriation, du mix et du remix. Certains, comme Stéphane Magnin ou Dejode & Lacombe, tiennent occasionnellement un rôle de rassembleur / catalyseur de projets. Le rassemblement de ces artistes dans Floating Bowl donne un panorama significatif d'un jeune art contemporain en France, que ce soit au niveau des références culturelles, de la manière de travailler que des réseaux humains et artistiques.