Croquis de Rodin : dans la chambre Claire
Croquis de Rodin : dans la chambre Claire, 2000-2002
Extrait de deux ensembles photographiques
Argentique, N&B, couleur, dimensions variables
• texte Lecture de la Chambre Claire de Roland Barthes
Postures de Rodin
Par Gilles Verneret
En 2001, je me suis essayé à l'exercice du nu photographique que j'avais un peu pratiqué dans ma jeunesse. Exercice délicat car souvent dévoyé par un voyeurisme, qu'impose quelque part la photographie dès son origine. Les derniers beaux nus que j'avais pu voir étaient ceux de Lee Friedlander de ses étudiantes, et depuis rien, ce thème comme le portrait ne semblait plus présenter d'intérêt artistique pour la génération d'après Jeff Wall, mais me motivait comme un challenge sur les traces de Weston et de Rodin. L'art se dirigeait déjà vers une vision sociologique et l'image érotique se repliait sur elle-même et quelques collectionneurs.
Je pris donc Rodin comme mentor avec sa série de croquis préparatoires, me cachant en quelque sorte derrière son aura plastique, mais redécouvrant vite que la photographie étant très réaliste et que : ce qui était distant et esthétique chez Rodin, convoquant l'imaginaire dans le dessin, devenait par sa crudité objet de fantasme auquel je n'échappais pas parfois (un sexe en dessin est fruit avant tout d'un coup de crayon, pendant qu'en photographie c'est une représentation identifiable)... Mes modèles, qui posaient souvent gracieusement, choisissaient elles mêmes leurs poses dans les albums du sculpteur et les mettaient en pratique sous mon œil expert ; elles adoraient ce jeu, car sentaient que la beauté y était au rendez-vous et toute femme cherche à être belle, une muse, admirée, objet de culte et d'art dans l'œil de l'artiste.
Je n'ai jamais refait de nus féminins et n'en referais sans doute jamais, mais en regardant cette série avec le recul, j'ai la satisfaction de constater qu'elle est fidèle à ma vision des choses : esthétique de la banalité ou négation d'une esthétique repérable, discrétion de l'opérateur devant son sujet, qui laisse au maximum la réalité s'exprimer sans retouches. J'ai fait cette série sur quelques semaines, dans la galerie naissante du Bleu du ciel, avec l'unique lumière solaire qui entrait par la fenêtre. Souvent je décrochais les photographies des murs à l'étage pour y installer le modèle sur le canapé. J'ai limité autant que faire se peut la position de voyeurisme, pour laisser apparaitre la posture des corps. Les photographies sont présentées avec les photocopies des dessins de Rodin.
Par Gilles Verneret
En 2001, je me suis essayé à l'exercice du nu photographique que j'avais un peu pratiqué dans ma jeunesse. Exercice délicat car souvent dévoyé par un voyeurisme, qu'impose quelque part la photographie dès son origine. Les derniers beaux nus que j'avais pu voir étaient ceux de Lee Friedlander de ses étudiantes, et depuis rien, ce thème comme le portrait ne semblait plus présenter d'intérêt artistique pour la génération d'après Jeff Wall, mais me motivait comme un challenge sur les traces de Weston et de Rodin. L'art se dirigeait déjà vers une vision sociologique et l'image érotique se repliait sur elle-même et quelques collectionneurs.
Je pris donc Rodin comme mentor avec sa série de croquis préparatoires, me cachant en quelque sorte derrière son aura plastique, mais redécouvrant vite que la photographie étant très réaliste et que : ce qui était distant et esthétique chez Rodin, convoquant l'imaginaire dans le dessin, devenait par sa crudité objet de fantasme auquel je n'échappais pas parfois (un sexe en dessin est fruit avant tout d'un coup de crayon, pendant qu'en photographie c'est une représentation identifiable)... Mes modèles, qui posaient souvent gracieusement, choisissaient elles mêmes leurs poses dans les albums du sculpteur et les mettaient en pratique sous mon œil expert ; elles adoraient ce jeu, car sentaient que la beauté y était au rendez-vous et toute femme cherche à être belle, une muse, admirée, objet de culte et d'art dans l'œil de l'artiste.
Je n'ai jamais refait de nus féminins et n'en referais sans doute jamais, mais en regardant cette série avec le recul, j'ai la satisfaction de constater qu'elle est fidèle à ma vision des choses : esthétique de la banalité ou négation d'une esthétique repérable, discrétion de l'opérateur devant son sujet, qui laisse au maximum la réalité s'exprimer sans retouches. J'ai fait cette série sur quelques semaines, dans la galerie naissante du Bleu du ciel, avec l'unique lumière solaire qui entrait par la fenêtre. Souvent je décrochais les photographies des murs à l'étage pour y installer le modèle sur le canapé. J'ai limité autant que faire se peut la position de voyeurisme, pour laisser apparaitre la posture des corps. Les photographies sont présentées avec les photocopies des dessins de Rodin.
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