Les amours perdues
Les amours perdues, 2000
Collection du Musée de Grenoble
Collection du Musée de Grenoble
Après une visite du Musée de la Mine, Slimane Raïs, influencé par le lieu, lance un appel à la population en recherchant des histoires relatant des circonstances de séparations amoureuses. Ces histoires furent imprimées sur des feuilles d'acier jaune et accrochées comme des ex-voto.
Vue de l'exposition Mise en perspective, Villa du Parc, Annemasse, 2001
Vue de l'exposition au Musée de la Mine, Saint-Étienne, 2000
Extrait des récits
Le 02.04.2000
Parler, pouvoir simplement le dire, le raconter. On m'a jamais demandé de m'en souvenir et pourtant... Comment oublier ? Ce fut une séparation sans bruit comme pour ne pas éveiller cet amour que je n'avais pas voulu voir. Je n'ai compris qu'après, ce qu'il avait été pour moi et ce qu'il serait toujours.
On aurait pu se séparer comme des gens normaux mais on n'aurait jamais pu. J'aurais pu crier, hurler, claquer la porte comme ces couples qui se déchirent mais rien, pas de mélos, pas de fracas, une séparation vide comme un événement naturel ? Non, une séparation silencieuse en réponse à une histoire d'amour fabuleuse. J'ai aimé quelques hommes après lui mais jamais aussi fort.
J'ai étouffé cette douleur qui peu à peu est devenue insupportable et puis un jour j'ai pleuré parce que j'ai su, su que je l'aimais d'un amour que je n'avais pas vu, parce qu'il s'était perdu dans l'histoire, comme l'eau dans le sable. Après j'ai pu guérir de ce mal que j'avais si longtemps dissimulé.
Peut-être aurais-je préféré une fin tapageuse avec des mots, des injures, des larmes, telle une issue banale ; j'aurais sans doute mieux vécu cette séparation pourtant si belle et désespérante à la fois !
Je vous remercie de votre écoute attentive, pour un sujet sur lequel on ne m'avait jamais vraiment écoutée.
Parler, pouvoir simplement le dire, le raconter. On m'a jamais demandé de m'en souvenir et pourtant... Comment oublier ? Ce fut une séparation sans bruit comme pour ne pas éveiller cet amour que je n'avais pas voulu voir. Je n'ai compris qu'après, ce qu'il avait été pour moi et ce qu'il serait toujours.
On aurait pu se séparer comme des gens normaux mais on n'aurait jamais pu. J'aurais pu crier, hurler, claquer la porte comme ces couples qui se déchirent mais rien, pas de mélos, pas de fracas, une séparation vide comme un événement naturel ? Non, une séparation silencieuse en réponse à une histoire d'amour fabuleuse. J'ai aimé quelques hommes après lui mais jamais aussi fort.
J'ai étouffé cette douleur qui peu à peu est devenue insupportable et puis un jour j'ai pleuré parce que j'ai su, su que je l'aimais d'un amour que je n'avais pas vu, parce qu'il s'était perdu dans l'histoire, comme l'eau dans le sable. Après j'ai pu guérir de ce mal que j'avais si longtemps dissimulé.
Peut-être aurais-je préféré une fin tapageuse avec des mots, des injures, des larmes, telle une issue banale ; j'aurais sans doute mieux vécu cette séparation pourtant si belle et désespérante à la fois !
Je vous remercie de votre écoute attentive, pour un sujet sur lequel on ne m'avait jamais vraiment écoutée.
Le 24.04.2000
Un jour comme les autres où tout allait très « bien-mal ».
Comme d'habitude, je me réveille la première. Je me dirige comme d'habitude vers les toilettes. Je reviens comme d'habitude dans la chambre pour prendre mes vêtements ; ça empestait ce matin-là ; il avait bu la veille avec ses copains et comme d'habitude, ça puait mais pas de la même façon ; il sentait autre chose...
Je renifle l'odeur de ses vêtements mais je ne trouve rien que son odeur que j'aimais toujours. Mais ce matin-là cette odeur était amère... Je ressentais cette amertume. Qu'avait-il fait cette nuit-là de non habituel ?
Alors, je le réveille ? Et le questionne à demi-réveillé ; il me révélera sans doute plus de chose spontanées que si j'attends qu'il soit pleinement disposé ? Non, je vais attendre... Je ne vais rien lui dire...
Il se réveille.
Il prend sa douche après m'avoir dit en sentant son tee-shirt : « je pue ». Tiens ! C'est ce que je pensais aussi me dis-je tout bas...
Il sort de la douche, il me regarde, je le regarde fixement et lui dis : « pas la peine de te demander... », Je n'ose finir ma phrase, il me répond : « c'est ça ».
Le téléphone sonne. Il répond et je vois un monstrueux sourire se dessiner sur son visage. C'était un visage d'amant, ce n'était plus celui que j'aimais... Ce sourire marquait le début de la fin. J'ai pris mes affaires et je suis partie sans rien dire. Il ne m'a pas vu partir, il ne m'a pas entendu partir ; car il voulait que je parte... Il m'a rappelé une semaine après pour me confirmer la chose...
Ce matin-là, il puait le copain qui trompe sa copine pour la première fois.
Un jour comme les autres où tout allait très « bien-mal ».
Comme d'habitude, je me réveille la première. Je me dirige comme d'habitude vers les toilettes. Je reviens comme d'habitude dans la chambre pour prendre mes vêtements ; ça empestait ce matin-là ; il avait bu la veille avec ses copains et comme d'habitude, ça puait mais pas de la même façon ; il sentait autre chose...
Je renifle l'odeur de ses vêtements mais je ne trouve rien que son odeur que j'aimais toujours. Mais ce matin-là cette odeur était amère... Je ressentais cette amertume. Qu'avait-il fait cette nuit-là de non habituel ?
Alors, je le réveille ? Et le questionne à demi-réveillé ; il me révélera sans doute plus de chose spontanées que si j'attends qu'il soit pleinement disposé ? Non, je vais attendre... Je ne vais rien lui dire...
Il se réveille.
Il prend sa douche après m'avoir dit en sentant son tee-shirt : « je pue ». Tiens ! C'est ce que je pensais aussi me dis-je tout bas...
Il sort de la douche, il me regarde, je le regarde fixement et lui dis : « pas la peine de te demander... », Je n'ose finir ma phrase, il me répond : « c'est ça ».
Le téléphone sonne. Il répond et je vois un monstrueux sourire se dessiner sur son visage. C'était un visage d'amant, ce n'était plus celui que j'aimais... Ce sourire marquait le début de la fin. J'ai pris mes affaires et je suis partie sans rien dire. Il ne m'a pas vu partir, il ne m'a pas entendu partir ; car il voulait que je parte... Il m'a rappelé une semaine après pour me confirmer la chose...
Ce matin-là, il puait le copain qui trompe sa copine pour la première fois.
Le 15.05.2000
Je travaillais de nuit dans une autre ville.
Elle était en formation pour devenir chef de projet multimédia.
Quelques jours avant noël, elle n'est pas rentrée à l'heure habituelle. Elle est revenue très tard, incapable de s'expliquer. Un long week-end de malaise pour lui faire avouer qu'elle était entrain de tomber amoureuse d'un de ses collègues.
Ils n'étaient pas encore amants.
Elle l'aimait mais ne voulait pas lâcher sa vie, sa maison, et la complicité qui nous unissait encore.
Lui, était marié depuis six mois et n'assumait pas le divorce que cette relation supposait.
Ils sont devenus amants...
Il a divorcé...
Ils ont cherché un nouvel appartement.
Je me suis retrouvé interdit de séjour dans ma propre vie.
Je n'ai préservé de huit ans de vie commune que la capacité de travailler encore pour elle sur ses projets.
Dernièrement, j'ai même travaillé pour lui, il y un an et demi.
Je l'aime encore.
Je les déteste.
Je travaillais de nuit dans une autre ville.
Elle était en formation pour devenir chef de projet multimédia.
Quelques jours avant noël, elle n'est pas rentrée à l'heure habituelle. Elle est revenue très tard, incapable de s'expliquer. Un long week-end de malaise pour lui faire avouer qu'elle était entrain de tomber amoureuse d'un de ses collègues.
Ils n'étaient pas encore amants.
Elle l'aimait mais ne voulait pas lâcher sa vie, sa maison, et la complicité qui nous unissait encore.
Lui, était marié depuis six mois et n'assumait pas le divorce que cette relation supposait.
Ils sont devenus amants...
Il a divorcé...
Ils ont cherché un nouvel appartement.
Je me suis retrouvé interdit de séjour dans ma propre vie.
Je n'ai préservé de huit ans de vie commune que la capacité de travailler encore pour elle sur ses projets.
Dernièrement, j'ai même travaillé pour lui, il y un an et demi.
Je l'aime encore.
Je les déteste.
Le 14.05.2000
Un matin, je me suis levée après une des nuits sans sommeil avec cette sensation atroce d'être morte, morte depuis des mois.
Je me suis regardée dans le miroir, le corps mortifié, souillé, les traits tirés par le cauchemar et les yeux vides sans aucune once de vie.
Une seule chose en moi, la voix de Caroline qui me dit : « Il faut réagir, tu dois partir ». Ces mots raisonnent dans ma tête et m'obsèdent.
Après, tout va très vite, mes affaires dans des cartons, entreposées chez cette fille qui deviendra une amie. Mes papiers récupérés et cachés. Un express gentiment prêté pour tout ramener. Plus tard, un après-midi inespéré, quelques heures sans surveillance, c'est la fuite.
Les dernières affaires chargées vite, très vite, il ne faut pas qu'il puisse me retenir et m'enfermer dans cette pièce qui avait brulée.
Ce jour-là, il pleut comme pour m'aider à me laver de ce passé que je souhaite oublier.
Un matin, je me suis levée après une des nuits sans sommeil avec cette sensation atroce d'être morte, morte depuis des mois.
Je me suis regardée dans le miroir, le corps mortifié, souillé, les traits tirés par le cauchemar et les yeux vides sans aucune once de vie.
Une seule chose en moi, la voix de Caroline qui me dit : « Il faut réagir, tu dois partir ». Ces mots raisonnent dans ma tête et m'obsèdent.
Après, tout va très vite, mes affaires dans des cartons, entreposées chez cette fille qui deviendra une amie. Mes papiers récupérés et cachés. Un express gentiment prêté pour tout ramener. Plus tard, un après-midi inespéré, quelques heures sans surveillance, c'est la fuite.
Les dernières affaires chargées vite, très vite, il ne faut pas qu'il puisse me retenir et m'enfermer dans cette pièce qui avait brulée.
Ce jour-là, il pleut comme pour m'aider à me laver de ce passé que je souhaite oublier.