L'équateur au pôle
L'équateur au pôle
Carton de l'exposition Entaché de lumière, École régionale des Beaux-Arts de Rouen, 2003
Le mot planisphère contient deux termes de géométrie, un plan et un volume, unis. La facilité de cette opération de langage fait oublier la difficulté que pose en fait la représentation d'une sphère sur un plan. La projection de Mercator résout partiellement ce problème : la surface de la terre est projetée depuis son centre sur un cylindre qui l'entoure, la ligne de contact de ces deux volumes désignant l'équateur. Le cylindre déroulé forme le planisphère où les parallèles et les méridiens se coupent à angle droit offrant une grille et des repères réguliers qui ont sans doute contribué à son succès pédagogique. Cette méthode restitue correctement les zones situées de part et d'autre de l'équateur, mais on sait que la superficie apparente du Groenland par exemple, est sans commune mesure avec celle qu'on observe sur un globe. En poussant la curiosité jusqu'aux régions situées très au-delà du cercle polaire, on voit que tous les parallèles restent de longueur égale à celle de l'équateur au lieu de diminuer progressivement en s'approchant du pôle et on constate que le pôle lui-même n'apparaît pas sur la carte : les méridiens ne convergent pas en un point, la superficie de l'océan arctique s'étend à l'infini. Compris dans toute son étendue, le planisphère produit des aberrations qui n'ont jamais troublé l'homme installé dans une représentation suffisante de son monde.
En affichant le planisphère sur les murs de toutes les écoles, le bienveillant rationalisme républicain impose un système arbitraire de représentation, mais cette contrainte, devenue familière, permet aussi à ceux qui en mesurent toutes les conséquences de s'évader et de découvrir l'étrange contiguïté de la mesure et de la démesure. Rencontrer des parallèles qui ont la dimension de l'équateur, à la hauteur du cercle polaire, trahit le dérèglement d'un système selon le géomètre ; le voyageur peut apprécier cet événement comme une forme d'exotisme.
Richard Monnier, 2000-2002
Carton de l'exposition Entaché de lumière, École régionale des Beaux-Arts de Rouen, 2003
Le mot planisphère contient deux termes de géométrie, un plan et un volume, unis. La facilité de cette opération de langage fait oublier la difficulté que pose en fait la représentation d'une sphère sur un plan. La projection de Mercator résout partiellement ce problème : la surface de la terre est projetée depuis son centre sur un cylindre qui l'entoure, la ligne de contact de ces deux volumes désignant l'équateur. Le cylindre déroulé forme le planisphère où les parallèles et les méridiens se coupent à angle droit offrant une grille et des repères réguliers qui ont sans doute contribué à son succès pédagogique. Cette méthode restitue correctement les zones situées de part et d'autre de l'équateur, mais on sait que la superficie apparente du Groenland par exemple, est sans commune mesure avec celle qu'on observe sur un globe. En poussant la curiosité jusqu'aux régions situées très au-delà du cercle polaire, on voit que tous les parallèles restent de longueur égale à celle de l'équateur au lieu de diminuer progressivement en s'approchant du pôle et on constate que le pôle lui-même n'apparaît pas sur la carte : les méridiens ne convergent pas en un point, la superficie de l'océan arctique s'étend à l'infini. Compris dans toute son étendue, le planisphère produit des aberrations qui n'ont jamais troublé l'homme installé dans une représentation suffisante de son monde.
En affichant le planisphère sur les murs de toutes les écoles, le bienveillant rationalisme républicain impose un système arbitraire de représentation, mais cette contrainte, devenue familière, permet aussi à ceux qui en mesurent toutes les conséquences de s'évader et de découvrir l'étrange contiguïté de la mesure et de la démesure. Rencontrer des parallèles qui ont la dimension de l'équateur, à la hauteur du cercle polaire, trahit le dérèglement d'un système selon le géomètre ; le voyageur peut apprécier cet événement comme une forme d'exotisme.
Richard Monnier, 2000-2002