Texte de Sophie Lvoff
Texte de Sophie Lvoff
Pour l'exposition Point lacé à l'INSA Lyon, 2017
Traduction : Louise Bouchu
Extrémité inférieure
de l'os de la cuisse.
L'os s'appelle le fémur.
Lorsque l'articulation est endommagée, on la remplace
par une prothèse en métal.
Extrémité antérieure de la jambe,
le plus gros des deux os de la jambe.
L'os s'appelle le tibia.
Lorsque l'articulation est endommagée, on la remplace
par une prothèse en métal
et en polyéthylène.
Arrière de la rotule.
Petit os plat, triangulaire,
à angles arrondis.
Lorsque l'articulation est endommagée, on la remplace
par une prothèse en polyéthylène.
Alors, le chirurgien opère :
Déplacement de la la rotule.
Les extrémités de l'os du fémur
et du tibia sont coupés et remodelés pour recevoir les éléments métalliques.
Coupe rotulienne : l'os est préparé
à recevoir les nouvelles prothèses.
Les deux parties de la prothèse
sont attachées aux os.
Une des pièces se positionne sur l'extrémité du fémur.
L'autre, sur l'extrémité du tibia.
Les pièces métalliques fémorales
et tibiales sont ancrées à l'os par
des systèmes de fixation cimentés
ou non cimentés.
Fixation de la rotule.
Un ciment spécial, le ciment osseux est utilisé pour la fixer.
De nos jours, certains chirurgiens utilisent de nouveaux matériaux :
le métal sur le métal, la céramique sur la céramique, la céramique
sur le polyéthylène.
L'exposition Point lacé de Lisa Duroux propose une recherche autour des articulations, des ligaments, des mécanismes et de l'artificiel. En utilisant des matériaux de récupération, combinés à des formes spécifiques modelées en céramique, Lisa Duroux travaille l'articulation d'un corps disloqué, androgyne, désarticulé, dur et doux à la fois. C'est à partir des matériaux trouvés dans son atelier que l'artiste entame son processus créatif, comme on fabriquerait un Frankenstein.
La sensualité et la tension se dessinent dans la rencontre des matériaux : cuir, corde, câble et céramique. De cette union naît une nouvelle anatomie. Des parties de corps suspendues au plafond s'étirent jusqu'au sol : ici, une main, là, le solide rembourrage d'un torse, là encore, un genou, ailleurs, un ligament. L'enchevêtrement anthropomorphique de fils électriques, de câbles, de sangles, de cuir, de tuyaux en cuivre et de genouillères trouve un équilibre.
Les cordelettes et les sangles industrielles évoquent un alpiniste arnaché avec soin qui gravirait une montagne dans un mouvement fluide. Les céramiques et les genouillères, quant à elles, nous rappellent à la fragilité du corps. Pour repousser ses limites, il faut du soin et de l'attention.
Dans cette exposition, le travail de construction de Lisa Duroux s'étend aussi aux œuvres textiles. L'artiste a puisé dans son expérience du monde de la mode pour en extraire un système de construction des matériaux.
Un simple motif rappelant un col claudine, coupé comme une patron de chemise, vient bouleverser les instructions littérales auxquelles un manuel de couture l'aurait destiné. Il se transforme en une pièce inédite : un objet en trois dimensions dont le dynamisme fait écho aux mouvements constructivistes et Dada qui utilisaient des tissus drapés et superposés, des crochets et des cordes.
Une autre œuvre évoque un site de fouilles archéologiques d'où l'artiste aurait déterré une forme industrielle et l'aurait recréée à différentes échelles, utilisant différents matériaux. Cette œuvre, qui emprunte aux codes des musées d'histoire naturelle et à leurs expositions de fossiles et de masques, interroge notre confrontation aux matériaux et notre idôlatrie dès lors qu'ils sont exposés.
Avec sa palette de couleurs subtile qui laisse à la lumière le soin de percer entre les formes, l'installation de Lisa Duroux vient détourner les matériaux industriels de leur dureté première et nous invite à considérer l'articulation et les mécaniques d'un corps actuel (dé)connecté de son environnement.