Perrine Lacroix
Updated — 25/09/2023

En los aires

En los aires

Ensemble d'œuvres
Réalisé en 2012 et 2023

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En los aires
Exposition personnelle
L'Angle Espace d'Art Contemporain, La-Roche-sur-Foron, 2012
Commissariat : Triptyk

« En septembre 2011, six personnes sont prises dans l’incendie de leur squat à Pantin. Des tunisiens et des égyptiens, échappés des "printemps arabes", s’étaient confié cette adresse près du périphérique parisien.

Le feu est parti de la pièce où dormait un égyptien de 36 ans. Un grand costaud avec d’épais sourcils. Alors que tous les autres s’entassaient jusqu’à douze par pièce, lui s’était préservé un coin d’intimité. Une pièce qui avait été baptisée "la chambre d’Alaa".
À l’intérieur, il y gardait jalousement une collection de livres d’occasion. Des romans en français, en arabe, des "vu à la TV" récupérés auprès de l’ancien locataire. Plus d’un millier d’ouvrages empilés dans des cartons qu’il espérait revendre. Le soir, pour voir clair, faute d’électricité, Alaa allumait toujours deux ou trois bougies qu’il scellait d’un peu de cire sur une commode. Les autres l’imitaient et les soufflaient avant de s’endormir.
Alaa, lui, ne les éteignait jamais. L’égyptien "avait peur du noir", témoigne l’un des squatteurs, "et il les laissait brûler jusqu’au matin".
Ce soir-là, ils étaient une vingtaine à dormir au squat. » d’après Emeline Cazi et Elise Vincent, extraits de « La chambre d’Alaa », article du Monde, 21 septembre 2012

Le Mur fracturé est un moucharabieh de briques rouges. Ici, il a été fracturé, comme celui du squat de Pantin où, en septembre 2011, six personnes, tunisiens et égyptiens, échappés du "printemps arabe" ont trouvé la mort, asphyxiés sans avoir pu retrouver le trou par lequel ils s’étaient faufilés la veille.

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Le mur écroulé est en briques de mousse (de mêmes dimensions que les vraies). Elles constituent un mur fragile qui tangue et se démolit au moindre passage.
Tombées de façon aléatoire, elles composent un parterre chaotique qui transforme le couloir en rue pavée suite à quelques émeutes révolutionnaires. Dans le même temps, ces briques de mousse dispersées au sol évoquent des matelas de fortune.

Faciles à manipuler, à superposer, elles deviennent modules de construction, ludiques pour les petits et les grands. Ils peuvent monter eux-même leur mur, bâtir des édifices éphémères, leurs « châteaux en Espagne ».



Mur écroulé, 2012-2023
Activation dans le cadre de l'exposition Le Living, Musée d'art contemporain de Lyon, 2023

Le Living
Exposition collective
Musée d'art contemporain de Lyon, 2023

Mur écroulé est une œuvre participative constituée d’un diptyque photographique et d’une centaine de briques noires. Faciles à manipuler et à superposer, ces rectangles de mousse deviennent les pièces d’un jeu de construction pour qui veut créer son édifice. C'est une œuvre à habiter, une cabane où se cacher, une bâtisse à monter et démonter, un moucharabieh qui tangue.
Tombées au sol, les briques forment une composition aléatoire qui évoque autant une rue aux pavés soulevés qu’un amas de matelas calcinés, une coulée volcanique ou un chantier en devenir.

Mur écroulé est un hommage à six tunisiens et égyptiens, acteurs et échappés du "printemps arabe" qui ont trouvé la mort dans un cynique autodafé dont la fumée des livres les asphyxia.

C’est un hommage aux personnes en recherche de liberté, en quête d’un espace autre, d’un espace où se sentir mieux mentalement et physiquement.

Les visiteurs, en activant l’œuvre, participent et prolongent cette quête. Ils la renforcent aussi par leur créativité. Chacun construit d’une façon qui lui est propre, aucune construction ne se ressemble. Il y a autant de propositions que de participants, comme si chaque construction était le reflet de la structure mentale de chacun.

© Adagp, Paris